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Mpox - Variole du singe : l'épidémie reflue mais le risque demeure

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La variole du singe, récemment renommée Mpox, a surgi dans notre actualité en mai 2022. Sa propagation a été si rapide que, deux mois plus tard, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) la déclarait « urgence de santé publique de portée internationale ». Aujourd'hui, l'épidémie semble en déclin, du moins en Europe, mais la vigilance reste de mise.

Le Mpox est une maladie virale cliniquement apparentée à la variole humaine. Elle est moins mortelle, mais elle peut être invalidante. Outre un fort syndrome grippal, elle engendre des éruptions à types de vésicules et pustules qui, dans la très grande majorité des cas actuels, se concentrent autour des zones génitales, anales et/ou buccales. Ces lésions cutanées peuvent démanger. Elles peuvent aussi être si douloureuses que seuls de puissants antalgiques aident à les supporter. Des complications sont par ailleurs possibles : surinfection de la peau, septicémie, encéphalite, complications respiratoires… D'où la panique créée par la diffusion rapide de ce virus à travers le monde : en à peine six mois, il a affecté plus de 82 000 personnes dans 110 pays préalablement non concernés. Il y avait de quoi craindre une nouvelle crise sanitaire, d'autant qu'en Afrique, le taux de mortalité de Mpox oscille entre 3 et 10 %.

Un raz-de-marée inattendu ?
La variole du singe est une zoonose, c'est-à-dire une maladie véhiculée par les animaux. Elle a été découverte en 1958 dans une population de singes en laboratoire au Danemark, d'où son nom. Mais, en réalité, le virus circule plutôt chez les rongeurs. Le premier cas humain est apparu en 1970, en République démocratique du Congo. Depuis, de petites flambées épidémiques surviennent de manière ponctuelle en Afrique centrale et de l'Ouest, généralement circonscrites à quelques villages ruraux au sein des forêts tropicales. « Nous n'avons pas encore formellement identifié le réservoir animal à l'origine de ces contaminations, mais nous soupçonnons l'implication des écureuils arboricoles et de divers rongeurs. La majoration du nombre de cas humains peut être mise en lien avec celle récente des interactions humains/faune, elles-mêmes en lien avec les changements d'usage des terres et la déforestation, observe le Dr Camille Besombes, médecin infectiologue et épidémiologiste à l'Institut Pasteur de Paris. Jusque-là, ce sont surtout les enfants qui étaient initialement touchés par la maladie, et elle se répandait rarement au-delà du cercle familial, car le virus se transmet surtout par contact direct et rapproché avec des peaux présentant des lésions. »

« Plusieurs signaux ont néanmoins commencé à nous alerter, se souvient pourtant le Dr. Besombes. Depuis quelques années, la fréquence des flambées épidémiques et leur ampleur augmentent. L'épidémie survenue au Nigéria en 2017 a marqué un premier tournant dans l'évolution de cette maladie : elle ne touchait plus seulement les enfants des zones rurales. Les adultes sont devenus majoritairement atteints, en ville, avec des présentations plutôt génitales. Il y a aussi eu des cas exportés : des voyageurs malades au retour de voyage au Nigéria en Europe, au Moyen-Orient, en Asie, aux États-Unis…. Mais, les clusters ont, chaque fois, été très limités, sans transmission interhumaine autochtone. Cela a conduit à ne pas alerter la communauté internationale sur la menace potentielle. » De son côté, le Dr. Gentiane Monsel, dermatologue au service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital de la Pitié Salpêtrière (AP-HP), à Paris, reconnaît que « Nous n'étions pas préparés au raz-de-marée qui nous a submergé au printemps ».

Comment expliquer que, cette fois, l'étincelle ait pris et se soit transformée en pandémie ? « Par la conjonction de plusieurs facteurs », s'accordent à dire nos deux expertes. Tout d'abord, l'immunité antivariolique collective a diminué : la variole humaine ayant été éradiquée en 1980, on ne vaccine plus contre cette pathologie depuis plus de 40 ans. Or le vaccin protégeait aussi à 85% contre la variole du singe. Ensuite, le virus est entré dans une communauté favorable à sa propagation : les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et de multiples partenaires. Le feu a si bien pris que les services hospitaliers qui, comme celui du Dr. Monsel, sont seuls autorisés à faire les diagnostics, ont été submergés. « Il a fallu nous organiser en urgence, créer une unité d'isolement et séparer les flux de patients, raconte la dermatologue. Il ne devait pas y avoir de contact entre les personnes diagnostiquées et celles en attente de diagnostic (potentiellement négatifs), ni entre les cas suspects et les patients venus se faire soigner pour d'autres motifs. » Il a aussi fallu gérer l'angoisse des patients face à une maladie émergente, qu'ils ne connaissaient pas et dont le seul nom pouvait les faire frémir. « Nous les recevions en combinaison de protection intégrale et, après diagnostic, nous les renvoyions chez eux se confiner pendant trois semaines. Ils pouvaient se sentir abandonnés et traités comme des pestiférés », ajoute la dermatologue.

Heureusement, c'est une souche du virus moins agressive que celle qui sévit en Afrique centrale qui s'est propagée. La forme de variole qu'elle provoque guérit généralement toute seule, sans autre traitement que ceux qui servent à soulager les symptômes. Sa létalité est aussi plus faible : on compte 59 morts dans le monde entre mai et novembre, ce qui ne représente que 0,07 % des cas déclarés, principalement des personnes immunodéprimées et/ou éloignées des systèmes de santé.

Reflux épidémique
Depuis l'automne, la situation semble s'être apaisée. 588 cas ont été déclarés dans le monde la dernière semaine de novembre 2022, contre le double la semaine précédente. En France, on ne recensait plus qu'une douzaine de cas en novembre, alors qu'il y en avait plus de 250 par semaine durant l'été. Cela s'explique, là encore, par plusieurs facteurs. Le mode de contagion du virus, par contact direct avec une peau lésée, l'empêche de se propager aussi vite que le Covid-19. En outre, dès le début de l'épidémie, quand il est apparu que les HSH étaient les premiers concernés (ils représentent 97 % des cas), les associations actives auprès de cette communauté ont largement communiqué sur Mpox, ses symptômes et ce qu'il fallait faire en cas de doute. La plupart des personnes à risques ont vite limité le nombre de leurs partenaires sexuels, et demandé à être vaccinés.

Le fait qu'un vaccin existait déjà a aussi joué. Il a été recommandé à toutes les personnes à risques : les HSH et les transsexuels déclarant de multiples partenaires sexuels, les travailleurs du sexe et les professionnels exerçant dans des lieux de consommation sexuelle. Il a aussi été administré aux cas contacts (partenaires sexuels d'un malade, personnes partageant le même lieu de vie, soignants…). Cela a permis de faire barrage au virus.

La prudence reste de mise
Si aujourd'hui l'épidémie reflue en Occident, la maladie continuera pourtant à circuler à cause de la présence, dans les zones endémiques, de réservoirs animaux. Un réservoir animal endémique pourrait également apparaître dans des pays occidentaux suite à une contamination des animaux sauvages ou des rongeurs domestiques. La variole du singe est donc encore très présente dans le monde, notamment dans des pays qui n'ont pas accès aux vaccins.

« Le risque de résurgence en Occident n'est pas négligeable », insiste le Dr. Monsel, qui rappelle que, pour les 250 000 personnes identifiées comme à risque en France, seules 135 000 doses ont été actuellement administrées, sachant que de deux doses sont nécessaires pour une couverture vaccinale complète. Les personnes non vaccinées ont quant à elle 14 fois plus de risque d'être contaminées. Or, tant que le virus circule, on ne peut pas écarter la possibilité d'une mutation qui rendrait le virus plus pathogène, ou d'une flambée impliquant une souche plus agressive de la maladie. « Nous ne devons pas lever le pied sur la vaccination ! »

Ce reportage vous a été proposé par la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF).
Retrouvez plus d'articles sur le site /fr/, onglet « Pour le grand public ».

Un grand merci aux docteurs Camille BESOMBES et Gentiane MONSEL pour leurs témoignages.